Dans l’épisode #2 du podcast Le Cercle coproduit par la startup Ceercle et le collectif Mu’ethik, nous rencontrons Lucas Blanes, gérant et Chef de projet de deux entreprises spécialisées dans l’agriculture urbaine : Place au Terreau et Le Grand Romanesco. Lucas nous partage ses expériences et conseils pour se lancer dans le secteur.
Diplômé en commerce international à l’Université de Lyon, Lucas a commencé sa vie professionnelle en voyageant partout dans le monde avec ses amis. Véritable globe-trotteur, Lucas a notamment passé du temps à Barcelone et en Amérique centrale où il s’est découvert une passion pour l’agriculture. En effet, il a longtemps fait du volontariat dans des fermes en permaculture ou agroécologie. À ce moment-là son choix était fait : laisser le commerce international derrière lui et se convertir à l’agriculture urbaine. Il a alors enchaîné les emplois et missions dans le domaine afin de monter en compétences « J’ai commencé à expérimenter et à apprendre en faisant », déclare-t-il. À son retour en France en 2016, il suit des formations de permaculture à l’Université Populaire de Permaculture et se lance dans un projet entrepreneurial fou avec ses amis Olivier Menahem et Sarah Richardier en créant l’entreprise Place au Terreau. Leur objectif est de reconnecter les citadins à la nature à travers des initiatives d’agriculture urbaine, en passant du potager d’entreprise aux projets de quartier multi acteurs. En 2018, ils se lancent dans un autre projet et co-créent Le Grand Romanesco, collectif à la croisée du paysagisme et de l’agriculture urbaine.
Sommaire
Le point sur l’agriculture urbaine
Pour Lucas, il n’y a pas une agriculture urbaine, mais des agricultures urbaines. En effet, ce secteur d’activité est très varié, il passe des potagers et jardins partagés au compostage. Contrairement à l’agriculture rurale, l’agriculture urbaine n’a pas vocation de nourrir les villes. L’agriculture urbaine a pour objectif de faire prendre conscience aux citadins de la réalité du travail de la terre, du jardinage et du mode de vie des paysans qui vivent de leur exploitation. Les externalités positives de l’agriculture urbaine sont nombreuses :
– « Renaturer » les sols
– Végétaliser les villes
– Améliorer le cadre de vie des citadins
– Sensibiliser et éduquer les citadins sur le jardinage, la saisonnalité, l’alimentation saine, la biodiversité ou encore la gestion des déchets
– Mettre en lumière les problèmes environnementaux tels que le réchauffement climatique
L’agriculture urbaine, bien qu’elle ne soit pas labellisée bio, reste écologique car elle reprend les grands principes de l’agriculture biologique en cultivant sans produits phytosanitaires et en respectant le plus possible le vivant.
D’après Lucas, la souveraineté alimentaire française est un véritable problème et les modèles économique et agricole ne sont pas soutenables. Notre Métropole n’a que 5% d’autonomie alimentaire, c’est-à-dire que 95% de ce que l’on produit est exporté et 95% de ce que l’on consomme est importé. L’agriculture urbaine favorise alors les circuits courts car produire à proximité permet de limiter les coûts de distribution et avoir un meilleur contrôle sur la production. En effet, les normes de production varient d’un pays à l’autre, par exemple la labélisation bio n’est pas la même en Europe qu’en Amérique du Sud ou en Asie. L’enjeu repose alors sur le fait de mieux produire et de soutenir une forme d’agriculture paysanne dévastée au fil des années. Lucas préconise de consommer bio, local, de saison et avec un label certifiant qu’il n’y a pas de produits chimiques. « La prise de conscience s’est faite, maintenant ce qui manque c’est la transformation » puis « il y en a pleins qui le font par des initiatives individuelles mais ce qui manque c’est l’élan et la structuration de tout ça par la puissance publique », affirme Lucas.
À Lyon, Lucas estime que l’agriculture urbaine a de nombreuses opportunités pour se développer. En effet, il y a de nombreuses friches et grandes étendues de pelouse arrosée dont on ne fait absolument rien : tant de problèmes que l’agriculture urbaine peut solutionner. Cependant, cela requiert un investissement de la part des Collectivités et de l’État.
Le rôle de Lucas Blanes dans l’agriculture urbaine
Place au Terreau crée, réalise et entretien des espaces cultivés en entreprise. Des animations autour de différentes thématiques telles que le jardinage sont mises en place avec les salariés. Au fil des opportunités, Place au Terreau s’est diversifiée et s’insère dans le champ large de l’agriculture urbaine. Plus que des potagers, elle anime aujourd’hui des jardins partagés avec des bailleurs sociaux et des copropriétés, elle travaille avec des écoles et des crèches, elle conçoit des jardins en permaculture avec des particuliers, ou plus récemment encore, elle réalise sa première houblonnière urbaine au Novotel Gerland. Le houblon est une liane qui pousse en hauteur et qui offre une couverture végétale sur mur pendant 6 à 7 mois par an pour ensuite être réutilisée pour brasser de la bière.
Le Grand Romanesco, lui, regroupe des acteurs lyonnais de l’agriculture urbaine sur des projets de plus grande échelle. Son objectif est de créer des projets d’agriculture urbaine mais surtout de les concrétiser et de les pérenniser dans le temps. Un projet d’agriculture urbaine se construit avec un véritable écosystème d’acteurs pour « aller chercher les bonnes compétences au bon moment », précise Lucas.
En 2018, le Ministère de la Transition Écologique a lancé un appel à projet « Mon projet pour la planète » remporté par Le Grand Romanesco. Il s’est donc installé au 8ème Cèdre, véritable ferme de quartier solidaire pilotée par le bailleur social Lyon Habitat. Pour lancer la machine, Le Grand Romanesco a reçu les subventions de Lyon Habitat et de la Métropole de Lyon. L’enjeu du projet était d’obtenir l’approbation des habitants pour que le maraîcher puisse cultiver directement en-dessous de leurs fenêtres. Le projet a donc intégré les habitants dans sa création en organisant des ateliers et des réunions publiques et en participant à des fêtes de quartier.
Lucas est inspiré par « l’effervescence et l’émulation en ce moment autour de l’agriculture urbaine », elles lui permettent de trouver le sens qu’il voulait mettre dans son travail. L’agriculture urbaine n’a pas d’ambitions démesurées, c’est l’ensemble des petits gestes du quotidien dans une démarche collective qui grignote peu à peu le bitume des villes pour rajouter du vert et reconnecter les citadins à la nature.
Ainsi, si vous souhaitez vous lancer dans l’agriculture urbaine, retenez les conseils de Lucas : aller à la pêche aux informations, rencontrer des acteurs du milieu, s’entourer d’un véritable écosystème et toujours rester en cohérence avec ses valeurs.